Concevoir un site comme celui-ci avec WordPress.com
Commencer

L’orthodoxie est-elle immunisée contre le modernisme et la dissidence ?

Ceci est une traduction de l’article de Dave Armstrong du 28 Février 2020.


Un chrétien orthodoxe écrit : « l’Eglise Catholique et Romaine a grandement changé dans les 20 dernières années, et on peut difficilement considérer que c’est la même Eglise que, disons, en 1965, ou même avant 1965. »

  • 1) Quel dogme Catholique a été modifié par Vatican II ? L’œcuménisme et la liberté religieuse n’ont aucun rapport avec les sacrements (le sujet duquel nous parlions) si c’est cela votre réponse. En quoi le baptême en particulier serait-il affecté ?
  • 2) Quand précisément l’Eglise Catholique est-elle devenue une Eglise différente d’auparavant, et comment ? Votre « affirmation » illustre la difficulté à apporter une réponse.
  • 3) Quand nos sacrements ont-ils cessés d’être valides à vos yeux, et pourquoi ?
  • 4) Par exemple, on ne peut pas dire qu’une femme n’est pas enceinte à un moment donné, et enceinte à un autre moment, sans admettre (et c’est obligatoire, inévitable) un moment décisif durant lequel le changement essentiel a été réalisé. Sans équivalence d’un tel moment dans l’histoire de l’Eglise Catholique, votre certitude que nous avons « changé » se base sur peu de substance et donc a peu de crédit. Pourquoi donc faire une telle accusation sans fondement ?

Quant à l’œcuménisme, j’ai montré qu’il était de plus en plus mis en valeur par l’Eglise Catholique bien longtemps avant 1962 (au moins à partir de 1900) – et nous pouvons indirectement montrer qu’il était impliqué depuis le début (e.g. la controverse Donatiste à propos du baptême), et présent de façon très certaine dans l’œuvre de St Thomas d’Aquin. Si vous pensez que nous sommes maintenant hérétiques jusqu’au point d’avoir perdu la succession apostolique, que s’est-il passé en 1962 qui a plus offensé la sensibilité Orthodoxe que la papauté et le filioque avant 1962 – et ce, de façon suffisante pour que nous ayons en plus perdu les sacrements, la grâce, etc ?

L’intégralité de cette perspective Orthodoxe minoritaire et anti-œcuménique est radicalement incohérente, et ce n’est pas une des marques caractéristiques de la vérité, et encore moins de la « plénitude » ou de l’exclusivité de la vérité, mon ami. Est-ce que l’orthodoxie est immunisée contre le libéralisme théologique, l’hétérodoxie, le nominalisme, la mécréance et l’apostasie, ainsi que contre toutes les absurdités qui en résultent, la folie, la confusion, le péché, le relativisme, la division, le non-accomplissement personnel, et les scandales ?

Un de mes premiers arguments à ce sujet est que l’Orthodoxie a compromis la morale Chrétienne historique concernant la contraception (qui était strictement prohibée dans l’Eglise primitive et dans les Saintes Ecritures) et le divorce (qui est aussi prohibé dans la Bible et dans l’Eglise primitive). Ceci est clair et net, et indéniable. Donc pendant que des Orthodoxes raillent tous les non-sens admis et scandaleux qui ont lieu dans des cercles Catholiques (comme une sorte de ‘preuve’ de leur supériorité), ils se permettent d’appeler le mal « bien » (divorce, contraception), et vont contre, soit leur propre Tradition ancienne, soit contre l’Eglise d’avant le schisme, soit les deux. Le sujet de fond est ce qu’enseigne n’importe quel groupe religieux en particulier.

Il nous faut mentionner énergétiquement que tout n’est pas rose non plus dans les cercles Orthodoxes. Les triomphantes critiques orthodoxes maintes fois entendues des libéraux et de la confusion Catholique s’apparentent à la parabole de la paille et de la poutre. Par exemple, j’ai déjà pris connaissance (par les Orthodoxes eux-mêmes) des problèmes suivants dans l’Orthodoxie. Si nous pouvons être honnêtes et francs vis-à-vis de nos problèmes, en tant que Catholiques, alors les Orthodoxes devraient en faire autant. Nous sommes tous adultes, nous pouvons y arriver. Heureusement, nous sommes réalistes à propos de la fragilité et de la faiblesse de notre nature humaine :

  • 1) L’« unité » Orthodoxe n’est qu’une simple fiction (alors que la notre réside dans une allégeance factuelle et institutionnelle en la personne du Pape et au dogme conciliaire).
  • 2) Une réticence à confronter le monde moderne dans ses problèmes sociaux ou ses questions philosophiques de façon égale (ce que le Pape – et tout particulièrement le Pape actuel – fait de façon routinière et avec influence, comme Vatican II l’a illustré).
  • 3) Une tendance à s’abstenir de demander le pardon, tout en s’attendant à recevoir des excuses des Catholiques et des Protestants (je remarque les récentes excuses adressées aux Juifs par l’Eglise Catholique, l’Eglise Orthodoxe a également sa propre histoire sordide et antisémite – particulièrement constatée dans, par exemple, la Russie Tsariste), et j’ai entendu dire que qu’il y avait un mépris relatif pour les méfaits historiques ou contemporains (par exemple, en Serbie, nous entendons parler en permanence du sac de Constantinople de 1204, mais très rarement des atrocités commises par les Orthodoxes dans le même contexte historique).
  • 4) Les schismes et les excommunications inter-Orthodoxes quand les désaccords surgissent (incluant le refus de la communion aux juridictions concurrentes).
  • 5) Le Patriarche Œcuménique n’est soit pas respecté, soit ouvertement condamné.
  • 6) La « Russification » ou l’« Héllénisation » des populations non-orthodoxes avant leur évangélisation, si elles sont évangélisées (l’équivalent de l’accusation de « latinisation », parfois justifiée, à notre encontre).
  • 7) L’ethnocentrisme (Franck Schaeffer a plaisanté au sujet de la spiritualité Orthodoxe qui peut très souvent être mesurée au nombre de baklavas qu’on peut manger).
  • 8) Le Césaropapisme (Soljenitsyne – un des mes héros préférés – a condamné certains Patriarches Russes à ce sujet).
  • 9) La majorité des Orthodoxes (ou beaucoup, peu importe) sont œcuméniques. Mais ROCOR et les groupes similaires considèrent cela comme étant une pure hérésie. Donc les faits seuls montrent que l’Orthodoxie souffre d’une désunion radicale, ceci est également pointé par la controverse liée sur le baptême des Catholiques convertis.

    On ne peut pas avoir le beurre et l’argent du beurre : l’Orthodoxie ne peut être à la fois unifiée (sans libéraux et avec une vague harmonie mystique englobant tout et connue par eux seuls) et divisée (les œcuménistes et les libéraux « occidentalisés » contre les « traditionnalistes » et les « exclusivistes »), selon les circonstances, afin d’avoir l’argument approprié en débat (dans les batailles polémiques avec les hérétiques occidentaux ou « Latin »).

    Et remarquez que ce désaccord en particulier (tout comme le 4° ci-dessus) s’est vu institutionnalisé au sein de l’Orthodoxie (c’est un des « fondements » de la « maison » ROCOR). Ceci ne se passe pas dans l’Eglise Catholique. Les libéraux n’ont pas réussi à subvertir (i.e. changer, faire modifier) une seule doctrine. Si l’Eglise Catholique n’était pas divinement protégée de l’erreur, elle aurait certainement fini par céder sur un petit point, comme par exemple la contraception – comme pratiquement tous les autres groupes Chrétiens ont failli (incluant l’Orthodoxie).
  • 10) Quelles sont les 4 choses en particuliers qui définissent le Catholique Américain « libéral » typique ou soi-disant progressiste ?

    a) Il défie l’autorité du Pape 
    b) Il défie l’interdiction Catholique à propos de la contraception
    c) Il défie l’interdiction Catholique du divorce, ou sinon demande une simplification de la procédure des annulations de mariage.
    d) Il est en faveur d’une Eglise Catholique Américaine plus ou moins indépendante (autocéphale ?).

    L’Orthodoxie est d’accord avec ces 4 objectifs ! Pourquoi donc ces choses ne sont pas considérées comme « libérales » quand l’Orthodoxie y croit ? J’ai même entendu dire qu’une personne aussi importante que l’Archevêque Kallistos (Timothy) Ware (auteur du très répandu The Orthodox Church : la première introduction à l’Orthodoxie pour beaucoup) serait en faveur de l’ordination des femmes.

Dans tous les cas, des histoires et des considérations comme celles-ci m’indiquent que les choses ne sont pas si différentes dans l’Orthodoxie, comparée au Catholicisme. Le nominalisme y est très probablement aussi important (bien qu’il soit difficile de le quantifier objectivement). Tous les groupes Chrétiens (même les Amish et les Baptistes les plus fondamentalistes) ont affaire au fléau diabolique du nominalisme, du libéralisme et de la mécréance. L’Orthodoxie tente de se retirer totalement et d’ignorer le modernisme quand l’Eglise Catholique fait l’effort de l’affronter courageusement, en appliquant l’injonction Paulinienne : « Je me suis fait faible avec les faibles, afin de gagner les faibles. Je me suis fait tout à tous, afin de les sauver tous. » (1 Corinthiens, 9 :22)

Donc nous nous attendrions à ce que l’Orthodoxie soit moins affectée par le modernisme et qu’elle ait moins de pertes dans cette bataille (puisqu’elle envoie moins de soldats au front). Mais si quiconque se convainc que l’Orthodoxie est un « port de paix », immunisé contre toutes ces difficultés, il ne fait que se complaire dans son aveuglement. La nature très communautaire et souvent culturellement isolée de l’Orthodoxie apporte simplement d’autres problèmes uniques tout aussi troublants que sérieux.

Hélas, les Orthodoxes – tout aussi bien que nous – doivent travailler, avoir des amis, des proches, de différentes tendances religieuses et philosophiques, et sont aussi soumis aux biais usuels de l’éducation académique, des médias, etc. Il n’y a aucune façon d’échapper totalement aux temps dans lesquels nous nous trouvons, sauf à vivre dans une grotte dans le désert …

Ce que je veux dire par là (j’espère ne pas avoir perdu le lecteur à ce stade), c’est que nous devons vraiment examiner les livres et enseignements officiels de chaque groupe, et laisser tomber les « arguments par le péché et le scandale » qui paraissent alors insignifiants et évasifs, qui prouvent que les menteurs hypocrites et malhonnêtes peuvent se trouver dans tous les groupes, et qui montrent aussi l’universalité du péché originel et actuel – j’espère que nous avons tous connaissance de ces vérités et réalités dont je ne souhaite pas avoir à faire la  démonstration ici).

Pourquoi ne pourrions-nous pas dialoguer de nos croyances communes et différentes en nous basant sur les Saintes Ecriture et les Saints Pères, plutôt qu’en échangeant des histoires horrifiantes perpétuellement, nous couvrant ainsi mutuellement d’opprobre, et offrant un spectacle pitoyable et infructueux ? Personne n’apprécierait voir cela plus que moi.

***

La partie ci-dessus a déclenché une avalanche de protestations sur mon blog, j’ai donc décidé de clarifier mes propos dans la partie ci-dessous :

***

Puisque certaines personnes (à la fois en privé et dans la liste) n’ont presque rien compris au but recherché, à mon intention et à la logique du dessus, je leur demande respectueusement de prêter attention à ce qui va suivre. J’ai pensé avoir été clair dans l’article (en particulier à la fin), mais je ne l’ai peut-être pas été, ou alors je n’ai pas suffisamment insisté à ce sujet (j’admets avoir été subtil dans ma façon de procéder) :

1. Beaucoup d’Orthodoxes polémistes (la plupart de branche anti-œcuménique) concluent que l’Eglise Catholique d’après le concile Vatican II est une Eglise différente (ou plutôt devrais-je dire pas une Eglise du tout ?), basée sur la présence scandaleuse (admise sans problème) de beaucoup de Catholiques  et pratiques hétérodoxes.

2. Ceci étant, je leur ai « retourné la faveur » en pointant des faits scandaleux dans l’Orthodoxie de notre temps, pas dans le sens où de telles choses sont nécessairement cautionnées officiellement, mais dans le but de montrer qu’aucun groupe religieux n’est préservé de ses lunatiques et de ses bouffons hétérodoxes ainsi que des fausses croyances qui leur correspondent. Dans cet objectif, j’ai mis sur la table des éléments anecdotiques (l’intention n’a jamais été d’utiliser ces éléments en tant qu’arguments irréfutables). Ceux-ci m’ont été apportés très largement par des Orthodoxes, ce n’est donc pas ma libre spéculation servant mes intérêts.

3. Si ces critiques de l’Eglise Catholique montrent supposément qu’elle a perdu son apostolicité, alors la même remarque peut être faite en ce qui concerne l’Orthodoxie. C’est donc un match nul – les « deux arguments » s’annulent l’un et l’autre. Si le péché et l’hypocrisie réfutent la succession apostolique, alors il n’y a absolument aucune Eglise historique, établie par Dieu sur la terre et nous somme tous dans l’erreur (ce qui est bien sûr contraire aux Ecritures Saintes).

4. A partir de là, j’affirme que ce que j’ai nommé « l’argument par le péché » ne démontre rien. Certains Orthodoxes ont férocement objecté à ma critique de leurs corruptions en pratique sans apparemment saisir le raisonnement que j’étais en train de faire. Ils ont uniquement vu l’arbre qui cachait la forêt. Mon argument est un argument par analogie (que j’apprécie tout particulièrement). Les entendre vociférer vilement en des termes pas peu clairs est une belle preuve que ma comparaison était une réussite. Le problème est qu’ils n’avaient pas compris que c’était ce type d’argumentation, et n’ont donc pas compris son but.

5. Ce qui précède étant acquis, nous revenons à ce à quoi j’ai appelé à la fin de ma lettre : je souhaite que les Orthodoxes et les Catholiques (et les Protestants) qui sont dans de telles listes (nous sommes tous des théologiens amateurs, autant que je puisse dire, et pas des érudits religieux) puissent discuter et dialoguer de la Bible et des Pères et d’interprétation bien plus souvent que nous ne le faisons. Nous acceptons tous la Bible.

Quiconque attribue une place d’honneur à l’histoire Chrétienne et à la continuité respecte les Pères et reconnaît leur grande pertinence dans la caractérisation de la doctrine orthodoxe Chrétienne et de la vraie Tradition. Si nous voulons critiquer un autre groupe religieux, je suggère que nous citions ses sources (i.e. ses dogmes) et ses positions qui font autorité plutôt que de pointer des hypocrites dans ses rangs.

6. En d’autres mots (pour résumer mon résumé), mon entière publication était un exercice rhétorique (toutefois absolument sérieux et sincère) consistant à montrer que « l’argument du péché » :
a) tire tout aussi bien contre son camp ;
b) ne prouve donc rien ;
c) poursuit la querelle et l’aigreur, l’offense, et n’accomplit presque rien.

Loin d’adopter une telle méthode pour critiquer l’Orthodoxie (comme si cela prouvait quoi que ce soit), j’ai plutôt essayé de montrer (par l’exemple, la logique, la rhétorique et l’analogie) sa très grande futilité.


Pour soutenir le travail de Dave Armstrong, vous pouvez lui faire un don via les instructions ici ou au compte paypal suivant: apologistdave@gmail.com.

Les commentaires sont fermés.

Créez un site ou un blog sur WordPress.com

Retour en haut ↑

%d blogueurs aiment cette page :