Extrait de la lettre à l’archevêque de Mayence, contre un certain Raoul qui incitait à faire des pogroms contre les juifs en période de croisade:
« La véritable victoire de l’Église sur les juifs nous la remportons peu à peu dans la mesure où nous les convainquons d’erreur et les amenons à la foi. Que gagnons-nous à ces massacres ? Sera-ce en vain que dans la nuit de chaque samedi saint, l’Église universelle offre sa prière pour les juifs infidèles, demandant à Dieu d’ôter le voile de leurs yeux et de les introduire dans la lumière de la vérité. Elle ne prierait pas pour eux s’il était impossible qu’ils se convertissent, mais elle les considère avec pitié sachant que le Seigneur a des trésors de grâces pour celui qui rend le bien pour le mal, l’amour pour la haine. Apprenez donc à votre homme (Raoul) à lire l’Écriture : « Ne les tuez pas, dit-elle , lorsque la multitude des nations sera entrée dans l’Église, Israël sera sauvé, le Seigneur reconstruira Jérusalem et rassemblera les tribus dispersées. Veut-il faire mentir le prophète et rendre vains les trésors de la charité et de la miséricorde divine ? La doctrine qu’il prêche ne vient pas de lui mais du démon qui vous l’envoie. Il ressemble bien à son patron infernal, le père de l’homicide et du mensonge, source de cette sagesse monstrueuse, infamante aux yeux de nos prophètes et de nos apôtres, négatrice de la piété et de la grâce. Sentez-vous la hideur de cette doctrine sacrilège qui, nourrie d’un esprit de mensonge, engendre la souffrance et l’injustice. »
Les juifs étant sensible à cette intervention, le Chroniqueur Ephraïm bar Iacob en témoigne :
« Le Seigneur a écouté nos pleurs et s’est tourné vers nous en leur envoyant un autre moine Bernard, un des plus grands et des plus respectés. Il disait : « celui qui touche à un juif pour s’en prendre à sa vie est fautif comme s’il se prenait à la prunelle de Jésus lui-même, car ses juifs sont ses os et sa chair. » Si le Seigneur ne nous avait pas envoyé Bernard, il ne sous serait resté aucun rescapé dans tout Israël. »
Sermon 79 sur le Cantique, trad. P. Zumthor, 10/18, U.G.E, Paris 1986:
« La charité de l’Église est trop grande pour qu’une rivalité de jalousie s’élève entre elle et la synagogue : bien au contraire, elle est prête à partager avec son ennemi l’amour de son époux. Il est écrit que le Salut vient des Juifs : le Sauveur reviendra au lieu d’où il est parti et les survivants d’Israël seront sauvés. Que les branches ne se montrent pas ingrates envers leur racine ni les fils envers la mère, qu’ils ne lui refusent pas d’avoir part à ce qu’ils ont reçu d’elle, ne la haïssent pas de les avoir nourris. Que l’Église tienne fermement le Salut que la Synagogue a perdu, et qu’elle le conserve comme un trésor jusqu’au jour où, la multitude des nations étant entrée dans le ciel, Israël sera sauvé… »
Source: Riché, Pierre. Petite vie de saint Bernard. Artège Editions, 2004. pp. 83-84.102
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