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Commentaire de Monseigneur Fernando Arêas Rifan:
Les modernistes, c’est clair, continuèrent à donner leurs fausses interprétations aux textes du concile, par exemple, au célèbre passage de Lumen Gentium, n° 8, au sujet de l’Église catholique :
« C’est là l’unique Église du Christ, dont nous professons dans le symbole l’unité, la sainteté, la catholicité et l’apostolicité, cette Église que notre Sauveur, après sa résurrection, remit à Pierre pour qu’il en soit le pasteur (Jn 21, 17), qu’il lui confia, à lui et aux autres Apôtres, pour la répandre et la diriger (cf. Mt 28, 18, etc.) et dont il a fait pour toujours la “colonne et le fondement de la vérité” (1 Tm 3, 15). Cette Église comme société constituée et organisée en ce monde, c’est dans l’Église catholique qu’elle subsiste, gouvernée par le successeur de Pierre et les évêques qui sont en communion avec lui, bien que des éléments nombreux de sanctification et de vérité se trouvent hors de sa sphère, éléments qui, appartenant proprement par le don de Dieu à l’Église du Christ, portent par eux-mêmes à l’unité catholique ».
Les modernistes essaient d’interpréter ce texte ainsi : « L’Église du Christ subsiste dans l’Église catholique ; mais elle peut aussi subsister dans une autre Église chrétienne ». À partir de là, on peut développer tout un faux œcuménisme, qui place sur le même plan les Églises protestantes et l’Église catholique. C’est ce que fit le théologien moderniste Leonardo Boff dans son livre Église : charisme et pouvoir, p. 138 :
« Si, d’un côté, l’Église catholique, apostolique et romaine est l’Église du Christ, de l’autre elle ne l’est pas. Elle est l’Église du Christ parce qu’elle apparaît au monde sous cette médiation concrète. Mais en même temps, elle ne l’est pas, parce qu’elle peut exister également dans d’autres Églises chrétiennes. Le concile Vatican II, dépassant une ambiguïté théologique des ecclésiologies antérieures qui tendaient à identifier purement et simplement l’Église du Christ avec l’Église catholique romaine, enseigne avec raison : “Cette Église (du Christ) constituée et organisée en ce monde comme société, c’est dans l’Église catholique qu’elle subsiste (subsistit in : elle prend sa forme concrète dans l’Église catholique)”. »
Cette interprétation fut condamnée par le Magistère de l’Église, dans un document de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi intitulé : Notification à propos du livre « Église : charisme et pouvoir » du P. Leonardo Boff, o.f.m. :
« De la fameuse expression du concile “Haec Ecclesia (à savoir : unica Christi Ecclesia)… subsistit in Ecclesia catholica”, il tire une thèse exactement contraire à la signification authentique du texte conciliaire, quand il affirme : “De fait, elle (à savoir l’unique Église du Christ) peut aussi subsister en d’autres Églises chrétiennes” (p. 131). Le concile avait, à l’inverse, choisi le mot “subsistit” précisément pour mettre en lumière qu’il existe une seule “subsistance” de la véritable Église, alors qu’en dehors de son ensemble visible existent seulement des “elementa Ecclesiae” qui — étant des éléments de la même Église — tendent et conduisent vers l’Église catholique ».
Et la déclaration Dominus Iesus, du 6 août 2000, sur l’unicité et l’universalité salvifique de Jésus-Christ et de l’Église, de la même Congrégation pour la Doctrine de la Foi, insiste à nouveau sur l’interprétation correcte à donner au “subsistit in” :
« Par l’expression subsistit in, le concile Vatican II a voulu proclamer deux affirmations doctrinales : d’une part, que malgré les divisions entre chrétiens, l’Église du Christ continue à exister en plénitude dans la seule Église catholique ; d’autre part, “que des éléments nombreux de sanctification et de vérité subsistent hors de ses structures”, c’est-à-dire dans les Églises et Communautés ecclésiales qui ne sont pas encore en pleine communion avec l’Église catholique. Mais il faut affirmer de ces dernières que leur “force dérive de la plénitude de grâce et de vérité qui a été confiée à l’Église catholique”. Il existe donc une unique Église du Christ, qui subsiste dans l’Église catholique, gouvernée par le successeur de Pierre et les Évêques en communion avec lui »
— Déclaration Dominus Iesus, 6 août 2000, n° 16 et 17
Lors de la présentation de cette Déclaration Dominus Iesus à la presse, le 5 septembre 2000, le cardinal Joseph Ratzinger, notre pape [jusqu’en 2013], donna l’interprétation du Magistère concernant les réalités bonnes qui se trouvent dans les autres religions, réalités considérées par les Saints Pères comme une préparation évangélique. De cette manière, il donne aussi l’explication correcte du passage analogue du décret Unitatis Redintegratio (n° 3), sur l’œcuménisme, où, en parlant des Églises séparées, celui-ci dit que, malgré leurs déficiences,
« l’Esprit du Christ, en effet, ne refuse pas de se servir d’elles comme de moyens de salut, dont la force dérive de la plénitude de grâce et de vérité qui a été confiée à l’Église catholique ».
Texte que le cardinal commentait ainsi :
« Par conséquent, ce n’est pas tout ce qui se trouve dans les religions qui doit être considéré comme praeparatio evangelica, mais seulement “ce que l’Esprit opère” en elles. De cela découle une conséquence très importante : est chemin de salut le bien qui est présent dans les religions, comme œuvre de l’Esprit du Christ, mais non les religions en tant que telles. Ce point est du reste confirmé par la doctrine même de Vatican II à propos des semences de vérité et de bonté présentes dans les autres religions et cultures, [doctrine] exposée dans la Déclaration conciliaire Nostra aetate : “L’Église catholique ne rejette rien de ce qui est vrai et saint dans ces religions. Elle considère avec un respect sincère ces manières d’agir et de vivre, ces règles et ces doctrines qui, quoiqu’elles diffèrent en beaucoup de points de ce qu’elle-même tient et propose, cependant apportent souvent un rayon de la vérité qui illumine tous les hommes” (NA 2). Tout ce qui de vrai et de bien existe dans les religions ne doit pas être perdu, mais bien reconnu et valorisé. Le bien, le vrai, où qu’ils se rencontrent, proviennent du Père et sont l’œuvre de l’Esprit. Les semences du Logos sont éparpillées de toutes parts. Mais on ne peut pas fermer les yeux sur les erreurs et les tromperies néanmoins présentes dans les religions. La constitution dogmatique de Vatican II, Lumen gentium elle-même affirme : “Bien souvent, malheureusement, les hommes, trompés par le démon, se sont égarés dans leurs raisonnements, ils ont délaissé le vrai Dieu pour des êtres de mensonge, servi la créature au lieu du Créateur” (LG 16) ».
D’ailleurs, le texte même de la Déclaration Dominus Iesus affirme :
« il serait clairement contraire à la foi catholique de considérer l’Église comme un chemin de salut parmi d’autres. Les autres religions seraient complémentaires à l’Église, lui seraient même substantiellement équivalentes, bien que convergeant avec elle vers le Royaume eschatologique de Dieu.
Certes, les différentes traditions religieuses contiennent et proposent des éléments de religiosité qui procèdent de Dieu […] De fait, certaines prières et certains rites des autres religions peuvent assumer un rôle de préparation évangélique, en tant qu’occasions ou enseignements encourageant le cœur des hommes à s’ouvrir à l’action divine. On ne peut cependant leur attribuer l’origine divine et l’efficacité salvifique ex opere operato qui sont propres aux sacrements chrétiens. Par ailleurs, on ne peut ignorer que d’autres rites naissent de superstitions ou d’erreurs semblables et constituent plutôt un obstacle au salut (cf. JEAN-PAUL II, Encycl. Redemptoris missio, n° 55). Avec l’avènement de Jésus-Christ sauveur, Dieu a voulu que l’Église par lui fondée fût l’instrument du salut de toute l’humanité (cf. Act 17,30-31) (cf. JEAN-PAUL II, Encycl. Redemptoris missio, n° 11). Cette vérité de foi n’enlève rien à la considération respectueuse et sincère de l’Église pour les religions du monde, mais en même temps, elle exclut radicalement la mentalité indifférentiste “imprégnée d’un relativisme religieux qui porte à considérer que ‘toutes les religions se valent’ ” (JEAN-PAUL II, Encycl. Redemptoris missio, n. 36). S’il est vrai que les adeptes d’autres religions peuvent recevoir la grâce divine, il n’est pas moins certain qu’objectivement ils se trouvent dans une situation de grave indigence par rapport à ceux qui, dans l’Église, ont la plénitude des moyens de salut (cf. PIE XII, Encycl. Mystici corporis : DzSch 3821) ».
— Déclaration Dominus Iesus, cit. n°21 et 22
Après que le théologien Jacques Dupuis, S.J., a lancé son livre Pour une théologie chrétienne du pluralisme religieux (1997), la Congrégation pour la Doctrine de la Foi a émis une Notification datée du 24 janvier 2001, où elle rappelle, dans le préambule, la vraie doctrine du magistère à propos de la valeur et de la fonction salvifique des traditions religieuses :
« Selon la doctrine catholique, il faut tenir que : “ce que l’Esprit fait dans le cœur des hommes et dans l’histoire des peuples, dans les cultures et les religions, remplit une fonction de préparation évangélique (cf. Const. dogm. Lumen gentium, 16)”. Il est donc légitime de soutenir que l’Esprit Saint, pour sauver les non-chrétiens, utilise aussi les éléments de vérité et de bonté qui se trouvent dans les diverses religions, mais considérer comme voies de salut ces religions, prises comme telles, n’a aucun fondement dans la théologie catholique ; en effet, elles présentent des lacunes, des insuffisances et des erreurs sur les vérités fondamentales regardant Dieu, l’homme et le monde. »
— CONGRÉGATION POUR LA DOCTRINE DE LA FOI, Notification du 24 janvier 2001, n° 8
Dom Antônio de Castro Mayer, dans l’instruction pastorale où il commentait, à la lumière de la Tradition, les documents du concile, spécialement sur l’Église (Lumen gentium) et sur l’œcuménisme (Unitatis redintegratio) donnait exactement cette interprétation correcte du Magistère, différente de l’interprétation moderniste :
« La Tradition considère comme préparation à l’Évangile les restes de vérité et de bien qui survivent dans les religions païennes. L’Esprit Saint s’en sert pour réveiller dans les cœurs de ces peuples des désirs de possession intégrale de la vérité et du bien, que seule la Révélation procure. De même dans les religions appelées chrétiennes, et qui se sont constituées comme effet d’un abandon de la Maison paternelle. En elles aussi la miséricorde de Dieu maintient des richesses éparses — tels que les Sacrements, la succession apostolique, les Saintes Écritures — lesquelles appartiennent à la vraie Église de Dieu, et doivent servir de point de départ pour un retour au sein de la famille ».
Source : Extrait de l’ouvrage de Monseigneur Fernando Arêas Rifan « LE MAGISTÈRE VIVANT DE L’ÉGLISE« , deuxième partie : Conséquences, applications ; Deuxième conséquence : Application de ces principes théologiques au Concile Vatican II ; § 5 : le cas du « subsistit in » et l’œcuménisme.